« La renaissance de l’usage du vélo dans les métropoles », une conférence-débat de Frédéric Héran

Samedi 1er avril 2017, le Collectif Cycliste 37 a eu l’honneur et le plaisir de recevoir Frédéric Héran, économiste et urbaniste, maître de conférences à l’Université de Lille 1, pour une conférence intitulée « La renaissance de l’usage du vélo dans les métropoles ».

Frédéric Héran, a présenté ce samedi 1er avril aux Halles de Tours, ses travaux les plus récents : ils décryptent l’évolution de l’usage du vélo dans les grandes villes de plusieurs pays occidentaux (*). De quoi dégager, pour les militants du CC37 réunis le matin pour leur Assemblée Générale, une tendance lourde très encourageante.

Très présent en France dans l’entre-deux guerres, le vélo a cédé du terrain d’abord à cause des deux-roues motorisés dans les années cinquante, puis des voitures lorsqu’elles sont devenues plus accessibles à la population. En Europe, l’Italie et les Pays-Bas, pays les plus anciennement urbanisés, ont été les premiers, dès les années soixante-dix, à réhabiliter l’usage du vélo. L’Allemagne a suivi, puis la France vingt à trente ans plus tard. Mais partout, l’enjeu n’était pas initialement cette renaissance. Le recours au vélo s’est trouvé induit par l’intention première des décideurs: réduire la place ou la vitesse des voitures en milieu urbain.

Ainsi en France, dans les années quatre-vingt-dix, fleurissent ces politiques de modération de la circulation automobile qui vont être déterminantes: la vitesse autorisée en ville passe de 60 à 50 km/h, les « zones 30 » apparaissent, le tramway refait surface, alternative proposée. Mais, spontanément, c’est l’usage de la bicyclette qui émerge et petit à petit s’impose.

Les cyclistes, qualifiés de « public résiduel » dans les années soixante-dix, effectuaient alors 0,2% des déplacements urbains (part modale) à Paris. Mais les « résidus » ont tenu bon et sont aujourd’hui vingt-cinq fois plus nombreux dans la capitale avec une part modale de 5 %.

En 2030, plus de vélos que de voitures dans Paris

Et c’est une tendance lourde. Bien au-delà des frontières de l’Europe. A New-York, l’usage du vélo a presque triplé entre 2005 et 2014. A Portland, Chicago, San Francisco, Seattle ou Washington, dans cette Amérique du Nord qui était au tout début du vingtième siècle le premier pays cyclable au monde, le même mouvement est observé.

Modélisée, cette transition de la mobilité urbaine ouvre des perspectives qui donnent le tournis : en 2030, il devrait y avoir plus de cyclistes que de voitures à Paris. Les pionniers qui ont ouvert la voie dans les années quatre-vingt-dix, étaient plutôt des hommes, peu argentés, écolos, indépendants et téméraires. Depuis, ce public s’est féminisé, conforté, solidarisé. Le déroulement est le même dans toutes les métropoles observées par le chercheur lillois : aux phases d’émergence et de décollage, succèdent des phases de croissance forte, de ralentissement et de stabilisation.

Le mouvement enclenché installe en effet plusieurs cercles vertueux ; « plus il y a de cyclistes, plus ils sont en sécurité », « plus le réseau cyclable se densifie, plus il est efficace », « plus le club des cyclistes grandit, plus il est attractif », « plus le parc de vélos grandit, plus l’offre de biens et services s’étoffent »… Tout cela construit un « Système vélo », que les Allemands intègrent dans un système plus large encore basé sur l’intermodalité : le « Système de transport écologique ». La pratique du vélo peut alors « s’installer » en ville.

Une « vélorution »

Tours, métropole depuis peu, est sortie de la phase des « pionniers » et l’usage du vélo est en voie de se normaliser en ville. En 2008, la part modale du vélo était de 4% dans l’agglomération et de 6% dans le centre-ville. Près de dix ans plus tard, si les pointages récents manquent pour une comparaison rigoureuse, il est acquis que cette part a augmenté.

La présence aux Halles de deux élus samedi après-midi – les adjoints Yves Massot pour Tours et Jacques Joselon pour Chambray-lès-Tours – atteste d’un début de prise en compte par les décideurs de cette évolution de la mobilité urbaine. Et leur souhait de l’accompagner. Ainsi, Tour(s)Plus a mis en place la location de vélos pliants, équipement privilégié de l’inter-modalité. La ville de Tours compte maintenant 235 km d’aménagements cyclables sur 280 km de voie. Et la mairie de Chambray travaille à l’aménagement d’un « barreau cyclable Saint-Avertin/Chambray-les-Tours/Joué-les-Tours ». Ceci pour ne citer que les exemples avancés durant la discussion.

Notre métropole s’engage donc, à son rythme, dans la voie ouverte depuis longtemps par des villes comme Copenhague, Amsterdam, Münster, Ferrare ou encore Strasbourg… Ces métropoles présentent de puissants modèles pour étayer la transition en cours chez nous. Leur étude met en évidence que ces transitions passent toujours sur le terrain par la détermination inlassable d’un groupe plus ou moins important de militants du vélo. Le CC37 a donc un rôle décisif à jouer dans les années qui viennent pour soutenir cette « vélorution ».

* « La renaissance de l’usage du vélo dans les métropoles », Frédéric Héran


Frédéric Héran tient également une chronique dans la revue de la FUB,
Vélocité.

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Autres publications de Frédéric Héran à télécharger sur le site Ville durable et mobilité

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